Le mercredi 16 février, une quarantaine de personnes se sont réunies à Malijai pour échanger sur la définition et les enjeux de la précarité alimentaire dans le Département. L’accessibilité à tous d’une alimentation saine, locale et de qualité est en effet d’un axe de travail ciblé par le diagnostic mené dans le cadre du Projet Alimentaire Territorial, en 2020.

Poursuivant un objectif de fédération des acteurs concernés, Provence Alpes Agglomération s’est rapprochée de la Direction Départementale de l’Emploi, du Travail, des Solidarités et de la Protection des Populations (DDETS-PP). Ce service de l’Etat est en effet chargé de coordonner, au sein du département des Alpes-de-Haute-Provence, la lutte contre la précarité alimentaire, notamment dans les suites de la crise sanitaire de 2020.

Un dispositif de formation-sensibilisation proposé par l’Agence Nouvelle des Solidarités Actives (ANSA) a encadré les échanges, suivant quatre séquences : définition de la précarité alimentaire et identification des publics, connaissance des évolutions du système d’aide alimentaire, réflexion sur l’amélioration de l’approvisionnement du secteur, construction de la coordination entre les acteurs.

Le déroulé de la journée est consultable à ce lien.

Etaient présents des représentants de la CAF 04, de la Chambre d’Agriculture 04, de toutes les  associations caritatives (Croix Rouge, Restos du Cœur, Secours Populaire, Secours Catholique, Banque Alimentaire, Point Rencontre, A Fleur de Pierre, CODES 04), des épiceries sociales et solidaires (ISATIS, ANDES, La Fourmi Gourmande), du Conseil Départemental (travailleurs sociaux), du secteur de l’hébergement (Association St Benoit Labre, SIAO), des élus et agents communaux (Digne, Manosque), ainsi que des partenaires publics de l’Agglomération (Communauté de Communes Alpes Provence Verdon – CCAPV, Parc Naturel Régional du Verdon).

Bruno ACCIAÏ, Vice-président de PAA délégué à l’agroalimentaire et à la ruralité, a ouvert cette journée pour marquer la volonté de l’Agglomération d’impulser cette dynamique de fédération des acteurs (fiche-action n°5.2 du plan d’action), avant de donner la parole à Maurice LAUGIER, Président de la Communauté de Communes Alpes Provence Verdon. Ce dernier était « venu pour témoigner de l’engagement des élus » pour la justice sociale, dont l’accès à des produits locaux et de qualité est un pilier. Cette journée était l’occasion pour la CCAPV de présenter les axes de travail de leur récent recrutement d’une volontaire en service civique sur le sujet. Enfin, le directeur adjoint de la DDETS-PP, Pierre-Emmanuel CANO, a clôturé ce pot d’accueil en rappelant le rôle essentiel des services de l’Etat pour coordonner la réponse à cet enjeu, en lien avec les acteurs de terrain.

Pour une première réunion des acteurs du monde social sur le sujet, les organisateurs ont bénéficié d’une représentation du département très satisfaisante. La journée a été rythmée par les présentations des intervenants (ANSA, de la DDETS-PP, de PAA et de la CCAPV) et des moments d’échanges, où la parole était laissée aux retours d’expérience, questionnements, précisions de la part des acteurs. L’objectif principal de la journée était de s’entendre sur une lecture commune de l’enjeu de précarité alimentaire dans le département, et de définir un système de coordination pour y répondre.
Valérie SIRAUD (ANSA) s’est réjouie du taux élevé de participation à la journée. « Vous êtes, chacun à votre place, acteurs de la lutte contre la précarité alimentaire ». La diversité des métiers, des interventions, des points de vue, les retours d’expérience ont permis d’aboutir à une définition exhaustive de cet enjeu, « prenant en compte tous les aspects de cette situation, pas seulement la dimension économique ». La définition de la précarité alimentaire retenue par l’ANSA correspond à une « situation dans laquelle une personne ne dispose pas d’un accès garanti à une alimentation suffisante et de qualité, durable, dans le respect de ses préférences alimentaires et de ses besoins nutritionnels, pouvant entraîner ou découler de l’exclusion et de la disqualification sociale ou d’un environnement appauvri » Issus du rapport du Labo de l’ESS de 2020.

La première partie de la matinée avait donc vocation à définir collectivement une situation de précarité alimentaire ainsi que les publics concernés, en l’illustrant de chiffres. Notons par exemple qu’on estime que la moitié des personnes avec un revenu mensuel net du foyer inférieur à 1200 euros n’arrive pas à manger 3 repas sains par jour. Concernant l’aide alimentaire, elle a presque été multipliée par deux ces dix dernières années. On sait pour autant qu’il existe un taux élevé de « non recours », à savoir que de potentiels bénéficiaires ne se tournent pas vers les services de distribution d’aide alimentaire. Enfin, un temps participatif a permis de mettre en lumière les conséquences sociales de la précarité alimentaire : impact sur la dignité, isolement, conséquences scolaires, malnutrition et problèmes de santé.

Afin d’ancrer cette présentation dans le contexte des Alpes-de-Haute-Provence, la DDETS-PP est intervenue pour dresser un portrait du territoire, qui a été complété au fil de la journée par les interventions du public.

Avant la pause déjeuner fournie par le traiteur local L’Etal des Trois Vallées, les esprits étaient déjà bien clarifiés sur ce que l’on appelle la « lutte contre la précarité alimentaire » : si la mobilisation d’urgence impulsées dans les années 1980 et encore aujourd’hui portées par les associations caritatives a un rôle curatif fondamental, la lutte contre la précarité alimentaire est une action systémique qui a pour vocation d’agir dans la prévention, et de s’inscrire dans le long terme. La matinée s’est donc conclue sur un constat, la nécessité de dépasser un modèle distributif pour parvenir à agir sur les causes structurelles de cette forme de précarité.

L’ensemble des données est consultable dans le contenu de la formation-sensibilisation, à ce lien.

L’après-midi était consacrée à une mise en lumière des difficultés logistiques de l’aide alimentaire. Après avoir dressé un tableau des nombreuses initiatives présentes sur le territoire pour aider les publics dans leur accès à l’alimentation (jardins d’autoproduction, distribution, colis, cuisine collective, épiceries sociales et solidaires, paniers solidaires,…), et rappelé les obligations réglementaires qui requièrent des collectivités et des services de l’Etat une certaine mobilisation dans la politique de lutte contre la précarité alimentaire, le focus a été fait sur la question de l’approvisionnement de l’aide alimentaire.

Le lien à créer entre le monde agricole et le monde social s’est dessiné au fil des conversations. Le Ministère de l’Agriculture et de l’Alimentation, et ses représentants régionaux, à la DRAAF, s’inscrit lui aussi dans cette politique ; « l’accès des publics aux produits frais et de qualité » est le maitre-mot des porteurs de PAT. Pourtant, à ce jour, les productions locales ne sont pas structurées pour répondre aux besoins de l’aide alimentaire. Tout l’approvisionnement s’organise donc en grande partie hors des circuits courts, non sans difficulté pour autant (pérennisation, diversification, qualité des ramasses,…)
Ainsi, les deux intercommunalités présentes ont pu montrer comment l’accessibilité alimentaire a été considérée comme un enjeu au moment de bâtir leur Projet Alimentaire Territorial (2019 pour la CCAPV, 2021 pour PAA). L’attention prêtée aux remontées de besoin des acteurs de terrain a permis de nourrir la définition du rôle des collectivités dans cette politique structurante.
L’après-midi s’est conclue par une concertation sur le comité de coordination qui émergera de cette journée : qui réunir, à quelle fréquence, poursuivant quels objectifs. « Le passage à l’action paraît nécessaire », souligne la Conseillère municipale à Digne-les-Bains déléguée à la lutte contre la précarité et les exclusions, Patricia BOCQUET.
Si cette première journée d’interconnaissance a permis de mettre en lumière les complémentarités des besoins et des capacités d’agir, le comité aura vocation à construire une stratégie pour y répondre. Les collectivités porteuses de PAT siègeront à ce comité piloté par la DDETS-PP, pour la poursuite et l’approfondissement de ce partenariat naissant.